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Contexte
La prescription de médicaments psychotropes aux enfants et adolescents pour alléger les symptômes du Trouble déficitaire de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH) est très variable dans les pays développés. Ces différences portent sur la réglementation de cette prescription, son taux actuel et l’évolution temporelle de ce taux durant les vingt dernières années. En France, la seule molécule autorisée pour le TDAH est le méthylphénidate. Nous décrivons l’évolution récente de la prescription pédiatrique de méthylphénidate en France, ainsi que certaines variables démographiques, cliniques, institutionnelles et sociales associées à cette prescription.
Méthodes
Nous avons analysé le pattern de consommation du méthylphénidate dans les bases de données de la Sécurité sociale, auprès de 87 % de la population française. Notre cohorte comporte 144 509 patients de 0 à 17 ans ayant reçu au moins une prescription de méthylphénidate entre 2010 et 2019.
Résultats
Entre 2010 et 2019, la prescription de méthylphénidate a augmenté de +56 % en incidence et de +116 % en prévalence. Chez les 3–17 ans, cette prévalence a été estimée en 2019 entre 0,61 % et 0,75 % de la population pédiatrique. Cette consommation concerne essentiellement les garçons (82,5 % à 80,8 % au fil de la période). La durée médiane de traitement chez les enfants de 6 ans en 2011 était de 5,5 ans. Les enfants les plus jeunes sont ceux pour lesquels les durées de traitement sont les plus longues. Le nombre de délivrances annuelles par patient a augmenté entre 2010 et 2019 et ceci suggère une augmentation des durées de traitement. Les diagnostics associés à la prescription de méthylphénidate ne correspondent pas toujours à l’indication thérapeutique, ni à l’Autorisation de mise sur le marché.
Parmi les enfants recevant une première prescription de méthylphénidate, 22,8 % se sont vu prescrire un ou plusieurs autres médicaments psychotropes dans la même année. Ces co-prescriptions ont été, le plus souvent, hors AMM et hors recommandation. Un quart des initiations et la moitié des renouvellements ont été réalisés hors de l’hôpital, donc hors de la recommandation des autorités de santé. La distribution de la consommation suggère un rôle prépondérant d’une minorité de praticiens et de services hospitaliers dans la prescription de méthylphénidate. Le suivi éducatif et psychothérapeutique par les CMPP a fortement diminué entre 2010 et 2019 pour les enfants recevant du méthylphénidate (de 4,1 % à 0,8 %). Les enfants et adolescents les plus jeunes de leur classe (nés en décembre plutôt qu’en janvier) ont plus de risque de se voir prescrire du méthylphénidate (+54 % en moyenne au fil de la période). Les enfants issus de milieux défavorisés présentent aussi un risque accru de médication.
Discussion
Dans les pays européens et en Amérique du Nord, le taux de prescription de psychotropes pour le TDAH s’est stabilisé ou montre une nette tendance à la stabilisation depuis 2008. En France, au contraire, ce taux est en croissance continue, si bien qu’en 2019, il a atteint un niveau supérieur à d’autres pays européens comme la Grande Bretagne. Les raisons de cette croissance sont discutées.
- Auteurs: S. Ponnou a, , H. Haliday b, B. Thomé c, F. Gonon d
a CIRNEF (EA 7454), université de Rouen Normandie, Mont-Saint-Aignan, Franceb PSY-DREPI (EA 7458), université de Bourgogne, Dijon, Francec Median Conseil, Pau, Franced CNRS, institut des maladies neurodégénératives, université de Bordeaux, Bordeaux, France
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